Ayant réalisé mon erreur d’agenda, je dispose d’un jour libre. Je commence pourtant par me lever très tôt pour aller voir le lever du soleil en haut de la falaise de Perry’s lookdown. J’avais réservé ma place dans ce camping, mais l’office des parcs nationaux me l’avait annulée deux mois avant le départ : le camping était fermé définitivement pour des raisons de sécurité. En y allant je ne comprends pas pourquoi. Le site est assez loin de la falaise. Quoi qu’il en soit je n’aurais rien vu : un brouillard dense me couvre de perles durant tout le trajet et il se met à pleuvoir légèrement sur site. Le nuages bas en provenance de Sydney bloquent la vue au delà de quelques centaines de mètres. Vraiment dommage. Car le parc national des montagnes bleues, dont le nom provient de la couleur de la brume produite par les Eucalyptus qui y poussent, est inscrit au Patrimoine de l’Unesco pour sa beauté.
Un petit rongeur fébrile et quelques oiseaux ne me consolent pas. Le froid et l’humidité me transpercent. Direction le café ‘Blackheath deli’ de la ville du même nom. Le déjeuner est un peu cher, 14 dollars. Mais en voyant la taille de l’assiette je ne regrette rien, d’autant qu’il est bon. Et puis je suis au chaud, à condition de ne pas rester sous le ventilateur. Quelle idée saugrenue d’allumer une ventilation avec un temps pareil!
La pluie s’installe. Que faire par un temps pareil? Le grottes de Jenolan seraient les plus vieilles du monde du fait de la stabilité du sous-sol Australien, je vais y faire un gros saut (près de 180 km aller retour). Le froid et l’humidité sont trop durs à supporter. Je sors la doublure et le pantalon étanches et me sens mieux.
Les deux dernières années sous l’influence météo de La Niña ont été désastreuses pour les routes australiennes. Celles de Jenolan en particulier : des deux routes qui s’y rendent, l’une est bloquée par un glissement de terrain et l’autre est en réfection, réduite à une voie. Je suis escorté par une camionnette de chantier jusqu’au fond du canyon d’où part la grotte, le dernier tronçon ne pouvant se faire qu’en bus. Le lac adjacent où vivraient des ornithorynques est interdit d’accès du fait des éboulements.
Je suis soulagé de poser mon sac de selle, de mon casque et de ma glacière dans une consigne. Même si, en libre service, elle n’est pas d’une sécurité à toute épreuve
La grotte est composée d’une partie peu active, ou l’eau s’infiltre en 30 minutes à 6 semaines, et d’une partie bien plus intéressante et active. Les draperies sont splendides mais c’est la tête de dragon qui est le clou du spectacle. Formée sur un support friable aujourd’hui disparu, elle est d’une originalité remarquable.
Le retour à la surface confirme que la pluie s’installe durablement. En arrivant à Katoomba (c’est aussi le nom de la tribu qui habitait les environs), le village a des allures de ville fantôme. J’ai besoin de laver mes affaires, et préfère en profiter pour passer la nuit à l’abri dans un auberge de jeunesse. Il y a là un motard asiatique avec lequel j’aurais bien discuté, mais soit il ne parle pas anglais, soit il est muet : il ne prononce pas un mot de la soirée. Les habitudes se perdent dans les auberges.
Le temps n’a pas changé le lendemain. J’aurais bien aimé voir les rochers accrochés sur les falaises. Les trois soeurs sont très visitées au point que plusieurs moyens d’accès y donnent accès : un téléphérique suspendu au dessus du canyon ainsi que le funiculairele plus pentu du monde, initialement construit pour exploiter les mines locales. Je prévoyais d’emprunter le ‘giant staircase’ ne devrait pas être trop fréquenté hors saison.
Selon la légende Katoomba, trois sœurs de la tribu, « Meehni », « Wimlah » et « Gunnedoo » vivaient dans la vallée de Jamison. Ces belles jeunes femmes étaient tombées amoureuses de trois frères de la tribu Nepean, mais la loi tribale leur interdisait de se marier.
Les frères n’étaient pas heureux d’accepter cette loi et ont donc décidé d’utiliser la force pour capturer les trois sœurs, provoquant une bataille tribale majeure.
Comme les vies des trois sœurs étaient sérieusement en danger, un sorcier de la tribu Katoomba a pris sur lui de transformer les trois sœurs en pierre pour les protéger de tout mal. Il avait l’intention d’annuler le sort une fois la bataille terminée, mais il fût lui-même tué. Comme il était le seul à pouvoir inverser le sort pour rendre aux femmes leur beauté d’antan, les sœurs restent dans leur magnifique formation rocheuse pour rappeler cette bataille.
D’autres points de vue jalonnent les falaises environnantes, comme le ‘hanging rock’. Ne m’avouant pas vaincu facilement, je tente d’aller voir l »Elysian lookout’. Là, c’est un glissement de terrain qui interdit le sentier. J’ai l’impression de perdre mon temps… direction Sydney.
Sur le trajet, des cacatoès se promènent sous les arbres. Ces oiseaux vivent en groupes de plusieurs dizaines d’individus, plutôt perchés dans les arbres et qui, s’ils jacassent tout ensemble, sont bien bruyants.
En descendant des montagnes bleues je vais traverser plusieurs banlieues bien différentes. Du parc national de Jellybean pool où j’ai hésité à me baigner à la cité un peu décrépie de Fairfield en passant par la mignonne petite ville pavillonnaire avec sa petite gare au style anglais les environs de Sydney sont disparates.