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Pourquoi?


Emoji thinking

C’est une question qui revient souvent quand je parle de mes projets d’escapade. Pourquoi?
Pourquoi aussi longtemps, pourquoi aussi loin, pourquoi seul, pourquoi quelque chose d’aussi extrême qu’à moto et sous la tente?
La réponse courte?

Pourquoi pas?

Cette réponse n’est pas aussi naïve qu’elle le parait. La vie est trop courte pour ne pas tenter régulièrement de ‘sortir du cadre’. Alors puisque j’ai de la ressource, ne pas l’utiliser serait regrettable.

Car j’ai la chance de pouvoir le faire : la capacité physique, le droit (passeport, permis moto…) et quelques moyens financiers. Je suis parfois touché par les combats quotidiens que mènent certaines personnes pauvres ou handicapées et je me dis que je dois profiter de ma situation pour avoir des objectifs audacieux jour après jour. Carpe diem, quam minimum credula postero.

Connais-toi toi-même

Je reconnais que les conditions d’un ‘road trip’ comme celui en Australie sont singulières. D’ailleurs, une autre question revient fréquemment: ‘un trajet aussi long, ce n’est pas ennuyeux’? Considérant la géographie de l’Australie, c’est un risque. Il est assumé. Un destination lointaine exige de rentabiliser l’énergie dépensée pour s’y rendre. De plus j’espère tirer bénéfice de cette durée. Nous avons tous besoin de prendre régulièrement du recul sur notre condition, fermer les yeux sur le regard des autres pour nous définir par rapport à nos valeurs propres. Sollicité par de multiples réseaux, autant sociaux qu’artificiels (au point de ressentir une forme de harcèlement au début du confinement en 2020), agressé par d’incessantes démarches marketing (publicités, démarchage téléphonique, spam…) chirurgicalement étudiées pour nous influencer, des ‘retraites’ telles que cette expédition sont pour moi régénératrices.

Partir seul n’est pas un choix, mais une conséquence des conditions extraordinaires de grands voyages. Sur de longues durées, l’imprévu est omniprésent : détours d’itinéraire pour découvrir l’imprévu, météo, fatigue, pannes… Les concessions se multiplient avec la taille du groupe et la longueur du trajet, jusqu’à saper le plaisir de partager l’aventure. Humblement, j’ai tenté de ne faire qu’une partie du tour de l’Australie, à deux, mais sans succès.

Jeune enfant avec un casque trop grand
Les voyages forment (et entretiennent) la jeunesse.

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage

J’aime dire que je peux faire mes valises en moins d’une heure quelles que soient les circonstances. Mais je n’ai jamais autant préparé un voyage que pour partir en Australie. Frontières bloquées par le confinement, les heures se sont muées en semaines, en mois puis en années d’acculturation. A l’image du petit poucet, j’aime bien comparer mes souvenirs de voyage à de petites pierres blanches qui jalonnent le chemin de mon existence.
Celui là est indéniablement un roc, un amer rassurant pour guider mes futures traversées.

Je peux remercier ma famille de m’avoir déjà permis de voyager dans plusieurs pays, de cultures et de niveaux de vie variés. L’histoire, la façon d’aborder la vie, le lien à l’autre, le lien à l’environnement, la langue, la musique, la façon de se nourrir, de se divertir, de consommer… il y a toujours des choses à découvrir, sur les autres et sur soi. L’effet est décuplé en quittant ces palais des glaces que sont les hôtels internationaux, tous fondus dans le même moule, et en s’échappant assez longtemps pour s’immiscer dans les habitudes des populations.

En cela, le choix de la moto n’est pas anodin. Certes, j’aime beaucoup conduire en deux roues. Mais je sais aussi que ce type de véhicule crée du lien. Que ce soit pour son originalité, pour l’image de fragilité que l’on peut lui associer, ou même pour la désinhibition que procure le sourire du motard extatique, elle facilite la discussion. Le plaisir de rouler est une des raisons de la durée de ce voyage : le temps passé à m’immerger dans le pays sera amputé de longs trajets routiers indispensables à la visite des régions, assez diverses mais toutes exotiques.

Parlons d’exotisme. Pour ne pas prendre de risque déraisonnable, un pays ‘développé’ m’a semblé préférable pour partir en camping moto itinérant. L’exotisme est alors limité. Mais en Australie la faune, flore, le climat, l’histoire aborigène et coloniale récente… m’ont beaucoup attiré. Et tandis que, dans d’autres pays similaires, la liberté est progressivement prise en otage par la standardisation d’entreprises obèses – Wallmart, Apple, General Motors, Amazon,…, l’Australie me semble avoir gardé de cette liberté grisante que l’on ressent à l’aube de l’âge adulte. J’adore cette sensation du ‘tout est possible’ et je ne serais pas surpris que nous partagions ce gout, exacerbé par des contraintes, sanitaires ou non.